Souffrance au travail du manager

Le manager face à l’incertitude

Le métier de manager n’est pas sans risques. Comme tout salarié, le manager est face à un ensemble de questions, de doutes et perplexités soulevés au travail. En ce qui concerne la maîtrise de l’incertitude dans l’organisation, la relation hiérarchique du manager avec son manager est fondamentale (Ayache & Laroche, 2010, p.134).

La hiérarchie à ce niveau peut parfois être un lieu d’ambiguïté. En effet, le lien hiérarchique peut parfois être oublié ou même négligé par les Directeurs ou cadres supérieurs compte tenu de la forte proximité avec leur Directeur Général (Mieg, 2015, p.32).

Pourtant, la qualité du lien hiérarchique est fondamentale dans la prévention de la souffrance au travail. En effet, la qualité du lien temporise l’incertitude et la solitude auxquelles peut être confronté le manager et permet également de donner du sens à son action.

Lhuilier (2009, p.89) note que, d’une manière générale, le sujet est de plus en plus seul pour arbitrer, décider de ce qui est juste ou non, ce qui doit être fait et comment. Ainsi, l’augmentation de la solitude au travail rejoint la problématique de la reconnaissance.

En effet, tout travail implique des jugements en termes de valeurs et de prestiges ; par conséquent, tout discours sur le travail réalisé « comporte une rhétorique de la valorisation de soi et de la distinction qui passe par la hiérarchie sociale » (Lhuilier, 2009, p.89).

Dejours précise que la reconnaissance (comme rétribution morale ou symbolique) délivrée par autrui est essentielle (2016, p.59) pour le travailleur (la reconnaissance joue un rôle majeur pour son identité et appartenance à un collectif de travail notamment).

Clot a, quant à lui, une position différente puisqu’il précise que ce qui est fondamental au travail, c’est plutôt de se reconnaître dans ses résultats, dans le travail accompli et dans « ce qu’on fait de soi dans sa propre activité ». C’est pourquoi se reconnaître dans le métier c’est aussi se retrouver dans ce qu’on réalise, au travers des quatre dimensions du métier (c’est-à-dire les dimensions qui peuvent être : personnelle, interpersonnelle, transpersonnelle et impersonnelle du métier). Ce point sera développé dans le dernier chapitre de cette revue de questions.

Par conséquent, si la temporisation de l’incertitude passe par la reconnaissance, elle nécessite également pour le manager des capacités d’analyses et d’ajustages permanents entre ce qui est possible et ce qui ne l’est pas ; c’est-à-dire en déterminant des priorités à partir des orientations transmises par la hiérarchie mais aussi de la capacité à faire de ses équipes (Mieg, 2015, p.32).

Les ajustages permanents inhérents au métier de manager confrontent inévitablement le manager à sa Direction générale et à ses collaborateurs.

La confrontation du manager à sa Direction et à ses collaborateurs mobilise des ressources conscientes et inconscientes qui peuvent lui échapper. De ce fait, continuellement, le manager doit se remettre en question et ré-apprendre à supporter l’incertitude de sa fonction.

C’est pourquoi le management est difficile car la situation d’encadrement isole et fragilise les liens interpersonnels (Mieg, 2015, p.160) ; cette spécificité de la posture de manager peut générer de la souffrance au travail.

La souffrance au travail peut être évoquée d’après Clot dès lors que l’activité est empêchée. La santé au travail repose en effet sur la capacité accordée aux travailleurs de discuter de la qualité de ce qu’ils font mais aussi de ce qu’ils sont empêchés de faire.

C’est pourquoi le collectif est fondamental en termes de prévention de la souffrance au travail (Clot, 2015, p.40).

Dejours (2015, p.286) identifie que la souffrance (même si elle peut connaître des destins différenciés comme le plaisir) est d’une manière générale indissociable de l’expérience du travail. La souffrance en tant que vécu subjectif, renvoie toujours à une expérience singulière liée à des situations et des pratiques de travail spécifiques. Par ailleurs, ce même auteur (2015, p.285) évoque la nécessité de mise en confrontation/délibération en groupe des expériences individuelles du travail, avec ce qu’on appelle le réel du travail (c’est-à-dire l’inattendu tel que les anomalies, les incidents du travail, etc.).

Ce réel du travail qui cherche à s’interpréter de manière individuelle et collective est fondamental car il peut permettre la prévention de la souffrance au travail via la recherche de sens au travail.

Source : Mesquita, K. (2020). Extrait mémoire Psychologue du travail : En quoi le sens au travail favorise t’il le développement du pouvoir d’agir chez les managers ?

Publié par Karine Mesquita

Psychologue

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